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Journ@l Electronique d’Histoire des
Probabilités et de la Statistique
Electronic Journ@l for History of
Probability and Statistics
Vol 1, n°2; Novembre/November 2005
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amis,"
de s e s
député
"à un a n c i e n
[Letter
from
Legendre
published in the newspaper Le Constitutionnel, 10 Octobre 1824]
as
Paris, 6 octobre 1824
Monsieur,
Vous savez que le ministre Corbière a menacé, dans le temps, de sa colère,
les membres de l'Académie qui n'avaient pas donné leurs voix au candidat
ministériel Binet, dont l'élection était ordonnée par une lettre signée
Lourdoueix. Cette colère, qui était comme un feu couvé sous la cendre, vient
d'éclater à mon égard; on m'a retiré une pension de 3,000 francs, dont je
joussais sous le gouvernement de Louis XVIII, et qui m'avait été accordée
plusieurs années auparavant.
Vous remarquerez qu'on choisit pour cet acte de rigueur extrême le
commencement d'un nouveau règne où tout announce que les principes de
modération et de justice vont remplacer les actes arbitraires et le despotisme
du ministère encore subsistant. Et qui prend-on pour victime? un homme qui
vit paisiblement dans sa retraite, sans avoir jamais nui à la marche du
gouvernement, et qui est âgé de plus de 72 ans.
Voilà une bénédiction de plus que reçoit le ministre Corbière, avant
d'obtenir lui-même la destitution que ses faits et gestes lui ont si bien méritée.
Je dénonce ce fait à un homme de bien, ami des lettres et des sciences
pour en faire tel usage qu'il jugera à propos.
Totus tibi.
Legendre
rue des Saints-Péres, n. 24
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Journ@l électronique d’Histoire des Probabilités et de la Statistique/ Electronic Journal for
History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Martignac, Ministre de l' Intérieur, au Roi, 13 Janvier 1828]
Paris, le 13 Janvier 1828
Rapport
Au Roi
Sire,
Le Sr Legendre, Membre de Votre Académie des Sciences, est un des
mathématiciens les plus distingués de l'Europe. Ses livres élémentaires ont été
traduits dans toutes les langues et sont devenus Classiques en France. Ce
savant qui est âgé de plus de 70 ans n'a retiré de ses longs travaux qu'une
fortune très médiocre que les besoins toujours croissants de son age avancé
rendent insuffisante.
J'ai l'honneur d'appeler les bontés de Votre Majesté sur ce savant, qui,
depuis la mort de M. de Marquis de Laplace, est le membre le plus ancien de
l'Académie des Sciences, et de lui proposer d'accorder de nouveau, au sieur
Legendre la pension de trois mille francs, dont il jouissoit sur le fonds des
indemnités littéraires à la disposition de Votre Majesté.
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Journ@l électronique d’Histoire des Probabilités et de la Statistique/ Electronic Journal for
History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Legendre à Martignac, 14 Janvier 1828]
A Son Excellence Mr le Vicomte de Martignac,
Ministre de l'intérieur,
Monseigneur,
J'ai reçu la lettre très gracieuse par laquelle Votre Excellence m'annonce
que le Roy a bien voulu me rendre la pension de 3000 fr. qui m'avoit été
accordée précédemment sur les fonds de Votre Ministère. Cette mesure
réparatrice et bienveillante que je dois à votre entrée dans le ministère et à
votre propre mouvement, excite d'autant plus vivement ma reconnaissance,
qu'elle m'enhardit a solliciter de votre justice le recouvrement des arrérages
dont j'ai été privé arbitrairement par votre prédécesseur, depuis le mois de
septembre 1824. En effet, s'il est reconnu, par le fait de mon nouveau brevet,
que ma pension avoit été supprimée sans motifs suffisans, comme cela est de
notoriété publique, la conséquence nécessaire est qu'il soit pris des mesures
pourque je ne supporte pas en définitive la perte assez considérable de ces
arrérages. C'est au surplus une question que j'ai l'honneur de soumettre à
Votre Excellence, et qu'elle décidera dans sa sagesse, après avoir pris les
renseignemens nécessaires sur les prétendus griefs qu'avoient attiré ma
disgrace.
Veuillez, Monseigneur, agréez l'hommage du
profond respect avec lequel j'ai l'honneur d'être
Votre très humble et très obeissant
Serviteur
Le Gendre
Membre de l'académie Royale des Sciences
et du bureau des longitudes, Quai Voltaire n° 9
Paris le 14 janvier 1828
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Journ@l électronique d’Histoire des Probabilités et de la Statistique/ Electronic Journal for
History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Legendre à Martignac, 20 Janvier 1828]
Paris le 20 janvier 1828
A Son Excellence Mr Le Vicomte de Martignac
Ministre de l'intérieur,
Monseigneur,
L' accusé de réception que j'ai eu l'honneur de vous adresser, en réponse
à la lettre de Votre Excellence du 13 de ce mois, contient une demande qui a pu
vous échapper et que je crois devoir vous présenter de nouveau d'une maniere
plus formelle.
La pension de trois mille francs dont je jouissois sous l'ancien
gouvernement, m'a été continuée à l'époque de la restauration, par une décision
du Roi dont j'ai eu connaissance par une lettre de M Le Chancelier de France en
date du 5 janvier 1815. Cette pension dont j'ai joui jusqu'au mois de septembre
1824, m'a été retiré à cette époque, soit par la simple décision de Sa Majesté
Louis XVIII qui auroit été signée dans les premiers jours de septembre, c'est-àdire, à une époque où l'on sait que le Roi, par l'effet de la maladie qui la enlevé le
16 du meme mois, avoit perdu presqu'entièrement l'usage de ses facultés.
Le Ministre qui exerçoit si cruellement envers moi sa vengeance de ce
que, quelques mois auparavant, je n'avois pas donné ma voix au Candidat Binet
qui sollicitoit la place vacante à l'académie dans la Section de Mécanique par la
mort de M. Bréguet, (tort que j'ai partagé avec 45 de mes confrères, puisque le
Candidat Ministériel, malgré la circulaire menaçante que le sieur Lourdoiex avait
adressée à moi et à plusieurs autres membres, n'a obtenu que 11 voix sur 57),
Le Ministre, dis-je, n'a pas daigné m'instruire que ma pension m'étoit retirée, et
je ne l'ai appris qu'en me présentant à la Caisse dans les premiers jours
d'octobre, pour toucher le mois précédent auquel je n'avois plus droit.
Telle est, Monseigneur, l'histoire simple et véritable de la pension qui m'a
été enlevée sans aucun véritable motif, ou plutôt parceque j'avois rempli mon
devoir envers l'académie, en votant pour le sujet le plus digne de remplir la
place vacante et qui a obtenu par le fait une très grande majorité.
Les journaux ont réclamé longtems contre cette injustice; je n'ai eu part
à ces réclamations que par une premiere lettre que le sentiment de ma
disgrace m'avoit dictée et que je ne désavoue pas. Du reste, je n'ai fait aucune
démarche, ni par moi ni par mes amis, pour recouvrer mon pension, et j'ai
attendu patiemment que le Ministère fût changé, bien persuadé qu'un nouveau
Ministre de l'intérieur, ami de la justice et des lumières, ne tarderoit pas à
réparer envers moi les torts de son prédécesseur.
Mon attente n'a pas été trompée et Votre Excellence, dès son entrée au
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
Ministère et de son propre mouvement, m'a remis en possession d'une pension
égale à celle que j'avois perdue.
Cette premiere faveur mérite sans doute toute ma reconnaissance; mais
ne me donne-t-elle pas le droite ou au moins l'espérance d'en obtenir une
seconde?
Puisqu'il est reconnu, par le fait même de la nouvelle pension qui m'est
accordée, que l'ancienne m'avoit été retirée injustement, ce qu'une enquête que
vous ordonneriez à cet effet, ne pourroit manquer de confirmer, la
conséquence naturelle et même nécessaire est que je ne doit pas perdre les
arrérages que j'ai toujours regardés comme n'étant que suspendus depuis le
1er septembre 1824. Cet objet qui s'élève à 10000 francs est d'une grande
importance, si non pour un vieillard de 76 ans, au moins pour sa femme moins
agée qui a partagé noblement sa disgrace et dont il doit défendre les intérets.
J'ose donc vous prier, Monseigneur, de prendre ma demande en
considération [*], et d'agréez l'hommage du profond respect avec lequel je suis
Votre très humble et très obéissant serviteur
Le Gendre
Quai Voltaire No 9
[*] [On what was presumably a first draft of this letter, one which was
not sent, Legendre added here the statement "et je regarde d'avance comme
favorable la décision que vous prendrez, soit de votre propre mouvement, soit
d'après un rapport de Mr Le Viscomte Siméon, ou de l'honorable Commission qui
devra être consultée désormais sur les encouragemens à aux gens de lettres,
aux savans et aux artistes."]
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Martignac à Legendre, 25 Janvier 1828][Draft]
Paris
Monsieur, J'ai reçu les deux lettres que vous m'avez fait l'honneur de
m'écrire, l'une le 14 et l'autre le 20 de ce mois, pour réclamer le payement des
arrérages de votre pension depuis le mois de 7bre 1828 jusqu'au mois de
janvier courant.
J'ai bien examiné la position dans la quelle vous vous trouvez et de même
aussi celle où me placent l'Etat des ordonnances et celui des crédits.
Il m'eût été agréable de voir que cet examen eut pu assurer le résultat
que vous désiriez mais j'ai dû reconnaitre qu'une mesure prise en ce sens était
impracticable.
Avec la décision de 1824 a cessé votre pension et la volonté du Roi, que
je vous ai récemment transmise ne rétablit pas ce qui était mais établit à votre
profit un nouveau titre bien motivé sur vos droits et vos services, mais qui ne
saurait avoir d'éffet sur le réglement des payements antérieurs.
Les comptes ont été rendus, les fonds ont été épuisés pour les exercices
qui précedent l'année où nous entrons et par le fait commun, par le mode admis
dans les finances du Royaume, je me trouve absolument hors d'Etat de
satisfaire à la réclamation que vous m'avez adressée.
Je vous prie de croire Monsieur, au regret que j'éprouve et de recevoir
l'assurance de ma parfaite considération.
Le Ministre Secrétaire d'Etat au
Département de l'Intérieur
M Le Gendre membre de l'Institut
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Legendre à Martignac, 14 Avril 1828]
Paris le 14 avril 1828
A Son Excellence, Mr Le Vicomte de Martignac,
Ministre de l'intérieur,
Monseigneur,
Lorsque je réclamai de votre bienveillance et de votre justice les arrérages de
la pension qui m'a été rendue dès votre entrée au ministère, Vous me fites
l'honneur de me répondre que l'état de la caisse des pensions ne permettait pas
de satisfaire immédiatement à ma demande, mais que si le moment favorable
se présentait plus tard, vous vous empresseriez de le saisir.
Maintenant, Monseigneur, que vous connaissez les dispositions de la
chambre des députés et que vous avez sans doute préparé dans votre budget
les moyens de satisfaire à des réclamations telles que la mienne, j'ose espérer
que vous voudrez bien accueillir ma nouvelle demander [?], et décider qui'il sera
pourvu dans un délai déterminé, au payement des arrérages de ma pension
montant à la somme de dix mille francs.
L'opinion publique a applaudi au rétablissement de ma pension, elle verra
avec non moins de satisfaction que mes arrérages me soient restituées, et que
vous ayiez ainsi rendu complette la réparation de l'injustice commise par votre
prédécesseur.
Veuillez, Monseigneur, agréer l'hommage du
profond respect avec lequel je suis
Votre très humble et très obéissant
serviteur
Le Gendre
Membre de l'institut, quai Voltaire n° 9
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Martignac à Legendre, 21 Avril 1828] [Draft]
Paris le 21 Avril 1828
Le Ministre
à Mr Le Gendre, membre de l'Institut,
quai Voltaire No. 9, Paris
Monsieur, J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le
14 dernier et par laquelle vous me rapellez la demande que vous m'avez
précédemment faite pour le payement des arrérages de la pension dont vous
jouissiez avant la décision du mois de septembre 1824, et dont je m'estime
heureux d'avoir obtenu pour vous le rétablissiment des bontés du Roi.
Les fonds des [Ecrivains?] intérieurs ayant été successivement épuisés
[je] ne puis faire aucune proposition rétroactive et la situation de mon Budget
ne me permet pas encore de proposer à Sa Majesté d'ajouter le
dédommagement à celui dont vous avez été l'objet par la décision du 13 janvier
dernier, une décision spéciale d'autant plus nécessaire que les termes de la
dernière, en vous accordant de nouveau la pension qui vous fut retirée ne
sauraient s'appliquer au temps qui s'est écoulé depuis son interruption jusqu'à
son rétablissment. Croyez à mes regrets pour le moment présent et au désir
que je prouve de trouver bientôt une occasion plus favorable.
Agréez, M.
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Legendre à Martignac, 4 Novembre 1828]
A Son Excellence Mr. Le Vicomte de Martignac, Ministre de l'intérieur,
Monseigneur,
Deux lettres que j'ai eu l'honnneur de vous écrire, en date des 20 janvier et 14
avril de la présente année, avaient pour but d'obtenir la restitution des
arrérages de la pension qui m'avoit été retirée par votre predécesseur et dont
vous m'avez fait jouir de nouveau à compter du 13 janvier dernier. Si vous
n'avez pas accueilli ma demande à ces deux époques, au moins vous ne l'avez
pas tout à fait repoussée et votre Excellence m'a fait espérer dans ses
réponses que s'il rencontrait une occasion de m'être utile, elle s'empresserait
de la saisir.
Ces occasions ne peuvent guère se rencontrer que pour ceux qui les font
naitre par leurs sollicitations ou par celles de quelques amis puissans. Pour moi
qui vis très isolé et qui employe mon tems à travailler, autant que peut le fair
un veillard[?] sujet à plusieurs infirmitès, mais soutenu par un véritable amour
de la science, je n'ai d'autre appui que la justice de ma cause.
Je me sentirais bien assez de courage pour regarder comme perdu l'objet
de 10100 fr que je réclame, et n'y plus penser. Mais dois je m'imposer ce
sacrifice sous un ministère reparateur, comme l'est sans doute celui de Mr. de
Martignac, dont j'ai deja éprouvé les bienfaits? Ne dois-je pas aussi défendre
les intérets de ma femme qui a droit de regarder comme faisant partie de
notre patrimoine, les arrérages dont j'ai été privé si longtems par une mesure
souverainement injuste?
Si sur la demande qui je renouvelle dans un moment où les graces du Roy
se répandent sur un grand nombre d'individus, Votre Excellence prononce la
négative d'une manière absolue, je cesserai dès lors toute réclamation. Mais si
vous vouliez seulement avoir quelques nouveaux motifs de vous décider en ma
faveur, peut être pourrais je vous en produire d'assez déterminans, et à cet
effet je prierais Votre Excellence de m'accorder quelques momens d'audience
particuliere dont elle m'indiquerait le jour et l'heure.
Veuillez, Monseigneur, agréer l'hommage
du profond respect avec lequel j'ai l'honneur d'être
Votre très humble et très obeissant
Serviteur
Le Gendre
Paris le 4 Novembre 1828
Jour de la Fete du Roi, jour
Membre de l'institut,
de graces pour les uns, d'espérance
Quai Voltaire, n° 9
pour les autres.
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[Legendre à Martignac, 14 Novembre 1828]
A Son Excellence Monsieur le Vicomte de Martignac,
Ministre de l'intérieur,
Monseigneur,
Permettez-moi de rapeller à Votre Excellence que j'ai eu l'honneur de lui écrire
le 4 de ce mois pour la prier de statuer définitivement sur la question de mes
arrérages.
Je suis presque confus de revenir tant de fois sur le meme demande et sur un
objet d'intérêt personnel; ces sortes d'importunités ne s'accordent guère avec
ma manière d'être habituelle. Car depuis la restauration je n'ai adressé aucune
demande à aucun Ministre, quoique les revenus dont je jouissois avant cette
époques [?], aient été diminués de plus de moitié par l'effet de différentes
mesures générales, et quoique j'aie acquis dans cet intervalle, de nouveaux
titres à la protection du Gouvernement, par le continuation de mes travaux. Je
n'ai donc point à me plaindre si les graces et les faveurs ne me sont point
venues chercher, je n'en ai sollicité aucunes.
Cependant, Monseigneur, si vous ne m'aviez pas rendu ma pension de votre
propre mouvement, je n'aurais pas cru déroger à mes principes en vous en
demandant le rétablissement, et alors je n'aurais pas manqué de réclamer en
meme tems la restitution de mes arrérages. Cette seconde demande est une
conséquence si naturelle de la première, que je crois bien, Monseigneur, que si
vous ne m'aviez pas prevenu pour l'une, vous auriez jugé convenable de
m'accorder toutes les deux.
En effet quand il a été accordé une pension à un homme de lettres ou à un
savant en récompense de ses travaux et à cause de la réputation dont il jouit,
cette pension est devenue sa proprieté et on ne peut l'en dépouiller avec
justice que dans les cas où il se seroit rendu coupable de quelque délit.
Je suppose, Monseigneur, que vous ayiez quelque bienveillance pour moi,
comme vos lettres semblent le témoigner, il arrivera cependant, si vous me
refusez mes arrérages, que vous consentirez tacitement à ce que je subisse
une amende de l0l00 fr parce que j'ai eu le malheur
de déplaire à Votre
prédécesseur pour n'avoir pas donné ma voix à son protégé Binet, c'est-à-dire
pour avoir rempli mes devoirs d'académicien et pour avoir contribué à écarter
de l'académie un sujet fort inférieur à celui qui a été choisi ( Mr. Navier) à la
majorité de 46 voix sur 57. Depuis cette époque, le meme sujet, avide de
toutes les places et de tous les traitemens, a abusé
de nouveau de la
protection que le Ministre lui accordait aveuglément, pour obtenir la place de
professeur au College de France, vacant par le mort du celebre astronome
Delambre, au prejudice de M. Mathieu qui avait réuni les suffrages unanimes du
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College de France et de l'académie; ainsi avec un masque de dévotion on peut
s'emparer effrontément du bien d'autrui et s'établir successeur des celebres
astronomes Lalande et Delambre, quand il est bien constaté qu'on n'a pas de
connaissances suffisantes en astronomie, et qu'on est incapable d'en acquérir,
d'astronomie étant une science très vaste qui exige une connaissance
approfondie des langues anciennes, de la chronologie, de la geographie, de
l'histoire &c. Dernierement encore le meme sujet, confiant dans son propre
mérite, n'a pas craint de se présenter à l'académie pour remplir la place
vacante par le décès de l'illustre auteur de la Mécanique Celeste, mais les
antécedens n'étoient pas favorables à ses pretentions, il a éte placé hors de
rang dans la liste de présentation, et n'ayant aucune chance de succès il a cru
devoir se retirer avant l'élection. Tel est l'homme au sujet duquel j'ai éprouvé la
disgrace dont vous pouvez, Monseigneur, effacer les dernieres traces.
Je prie Votre Excellence d'agréer
l'hommage de mon profond respect
LeGendre
Quai Voltaire no 9
Paris le 14 novembre 1828
[Martignac à Legendre, 26 Novembre 1828] [Draft]
Paris le 26 9bre 1828
Monsieur, les raisons qui m'ont empêché d'accueillir la demande que vous
m'avez déjà fait l'honneur de m'adresser pour le payement des arrérages de
l'indemnité annuelle dont vous avez été privé pendant quelques annés
subsistent malheureusement encore et elles ont acquis depuis mes
precédentes réponses un nouveau degré de force par les diminuations
considérables qui ont été apportée au Budget de mon département. Je me voir
donc avec un peine extrême obligé de vous exprimer le vif regret que j'éprouve
de ne pouvoir vous donner aujourd'hui une réponse plus favorable et plus
conforme au desir que j'aurai de vous être utile.
Recevez, Monsieur, l'assurance
de ma considération distinguée
Le Ministre Sécretaire
d'Etat au Department
de l'intérieur
M. Le Gendre, Membre de l'institut
Quai voltaire No 9
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[Legendre à Guizot, Ministre de l'Intérieur, 25 Août 1830]
Paris le 25 août 1830
A Monsieur Guizot
Ministre Secretaire d'état au departement de l'intérieur
Monsieur le Ministre
Ayant eprouvé de grands injustices des gouvernemens précédens, je dois
esperer qu'elles seront réparées sous le gouvernement nouvellement établi qui
promet à la france une nouvelle ete de bonheur, de gloire, et de prospérité. Je
suis maintenant trop agé et trop infirme pour solliciter des places pareilles à
celles que j'ai perdues depuis 1814; je ne serais plus en état de les remplir; je
me borne donc à vous prier, Monsieur le Ministre, de me remettre en
possession de la pension de 3000 fr dont je jouissais précédemment, sur les
fonds de votre ministère. Cette pension, qui m'avait été rendue par M. de
Martignac, à compter du 13 janvier 1827, a été réduite arbitrairement par M.
de Montbel, à 2000 fr à compter du 1er janvier 1830. J'ai de plus à reclamer
les arrérages de la dite pension dont j'ai été privé par le Ministre Corbière, de
déplorable mémoire, depuis le 1e r septembre 1824 jusqu'au 12 janvier 1827.
Ces arrérages s'élévent à une somme de 10100 fr, fort importante pour moi;
j'en avais dans le tems sollicité la restitution auprès de M. de Martignac, en le
priant d'observer que cette restitution était une conséquence necessaire de
celle de ma pension qu'il avait fait revivre de son propre mouvement; mais ce
ministre me répondit, sans nier la legitimité de ma demande, qu'il etait denué
des moyens d'y satisfaire.
Je fus donc réduit à attendre des tems plus
opportuns pour faire valoir ma réclamation, et il me semble que ces tems sont
arrivés, puisque le ministre qui dispense, avec l'autorisation du Roi, les
encouragemens des gens de lettres et des savans, est lui même un de nos
hommes de lettres les plus distingués.
Veuillez, Monsieur le Ministre, agréer l'hommage
de mon profond respect,
Le Gendre
Doyen des géomètres de l'académie
des sciences et du Bureau des longitudes
Quai Voltaire no 9
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[Legendre à Guizot, 26 Août 1830]
Paris le 26 août 1830
Rectification d'une erreur de
date à ma lettre du 25 août
Dans la lettre que j'ai eu l'honneur d'ecrire hier 25 août, à Monsieur le ministre
de l'intérieur, les dates citées par moi des 12 et 13 janvier 1827 doivent être
remplacés par les vraies dates qui sont des 12 et 13 janvier 1828.
Le Gendre
Membre de l'institut
Quai Voltaire no 9
[Guizot à Le Roi, 30 Août 1830] [Draft]
30 août 1830
Rapport au Roi
Sire,
Mr . Legendre, Doyen de l'academie des sciences et l'un des mathématiciens les
plus distingués de l'Europe, jouissait à ce titre d'une indemnité de trois-mille
francs sur les fonds du Ministère de l'Intérieur.
Après l'avoir perdue sous l'un des ministères du dernier gouvernement, Mr .
Legendre la recouvra
dès le 13 Janvier 1828; mais par une décision
subséquente en date du 1e r Janvier 1830 ce savant vient de l'avoir réduite à
deux-mille francs..
Le moment de réparer l'injustice dont se plaint Mr . Legendre est arrivé, Sire.
Bien persuadé que votre Majesté ne voudra pas le laisser échapper, j'ai
l'honneur de lui proposer le rétablissement de l'indemnité de trois mille francs
accordée à l'lun de nos savants les plus honorables et qui aurait dû lui être
conservé intacte, puis qu'il n'a retiré qu'une fortune très-médiocre de ses
longues et utiles travaux.
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Legendre à Montalivet, Ministre de l'Intérieur, 26 Novembre 1830]
Paris le 26 novembre 1830
A Monsieur Le Comte de Montalivet, Pair de France, Ministre
et Sécrétaire d'état au Dépt . de l'intérieur,
Monsieur le Ministre
Persuadé qu'il est dans l'intention du Ministère actuel de réparer autant qui'il lui
sera possible, les injustices commises par les Ministeres précédens, j'ai cru qu'il
me serait permis de réclamer près de vous les arrérages non encore soldés
d'une pension de 3000 fr. dont j'ai été privé, à compter du 1e r septembre
1824, par M. DeCorbière1, pension qui m'a été rendue ensuite par M. de
Martignac, dès son entrée au Ministere, mais sans qu'il me fût tenu compte des
arrérages montant alors à 10100 fr. Par une fatalité singuliere cette même
pension de 3000 fr fût réduite à 2000 par M. de Montbel, à compter du 1e r
janvier dernier, puis rétablie à son taux prioratif par M. Guizot, à compter du
1e r septembre, ce qui m'a fait supporter une nouvelle perte de 666 fr.
Je sais, Monsieur le Ministre, que la demande que j'ai l'honneur de vous
soumettre est peu susceptible d'être accueillie, dans un moment où l'intéret de
l'état exige plus que jamais de sévères économies, mais si vous considerez
qu'un vieillard qui est maintenant dans sa 79eme année et qui avait obtenu une
pension comme récompense de ses travaux, a du compter sur la jouissance non
interrompue de sa pension comme sur celle de son propre patrimoine, peut être
en reconnaissant la justice de cette demande, trouverez-vous moyens d'y
satisfaire dans un tems plus ou moins éloigné.
Cette réparation, j'ose le croire, serait vue avec satisfaction par tous les
amis des sciences et des lettres, et j'ai droit de l'attendre du Ministre éclairé
qui préside à mon profond respect.
Veuilliez, Monsieur le Comte, agréer l'hommage de mon profond respect
LeGendre
Membre de l'académie des sciences
et du bureau des longitudes
Quai Voltaire no 9
(1) Cette injustice fût dénoncée avec beaucoup d'énergie dans les journauz
de cette epoque, ce qui ne contribua pas peu à flétrir dans l'opinion public le
ministère qualifié ensuite de déplorable par le continuation de ses mesures
arbitraires et liberticides.
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History of Probability and Statistics . Vol.1, n°2. Novembre/November 2005
[Legendre à Royer-Collard, 5 Janvier 1831]
Monsieur Royer-Collard, directeur des sciences
et arts au Ministère de l'intérieur
Monsieur
La lettre que j'ai eu l'honneur d'écrire à Monsieur le Ministre pour réclamer les
arrérages de la pension dont j'ai été privé du tems de M. de Corbière, n'est pas
encore répondue et je conçois très bien que les affaires publiques dont M. le
Ministre a été chargé dans ces dernier tems, sont d'une nature si grave et si
importante, qu'il ne lui a été guère possible
de s'occuper des affaires
particulières. D'un autre côté je ne me dissimule pas que ma réclamation ne
peut avoir d'effet qu'autant que le Ministre aurait à sa disposition des fonds
spéciaux pour y pourvoir, ce qui demanderait peut être un article particulier du
budget. Ces considérations me portent à désirer qu'on veuille bien reconnaitre
pour le moment la justice de ma demande et qu'on me donne l'espèrance d'y
pourvoir dans un tems plus ou moins éloigné. Et cependant il serait peut être
possible de me rendre des a présent par un rappel, les 666 fr 66 c qui m'ont
été retornis[?] sur les huit premiers mois 1830, en vertu de la décision de M.
de Montbel qui a réduit à 2000 f la pension qui M. Guizot a rétablie au taux de
3000
Je vous serais donc fort obligé, Monsieur le directeur, si par vos bons
offices, j'obtenais de Monsieur le Ministre une réponse satisfaisante dans le
sens que je viens d'indiquer.
Veuillez, Monsieur, agréer l'assurance de la considération très distinguée
avec laquelle j'ai l'honneur d'être
Votre très humble serviteur, Le Gendre
P.S. Votre députation de l'institut dont je faisais partie ayant été reçue
par Monsieur le Ministre, le 1e r de ce mois, j'ai eu l'occasion de l'entretenir un
instant de l'objet de la lettre que je lui avais addressée; Monsieur le Ministre m'a
repondu qu'il serait fort aise de pouvoir m'obliger, attendu qu'il me connaissait
par celui de mes ouvrages qu'il avait étudié pour entrer à l'Ecole polytechnique.
Paris le 5 janvier 1831
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[Legendre à Montalivet, 15 Janvier 1831]
sont joints deux vol in 4°, demi-reliure
avec un double supplement broché
Paris, le 15 janvier 1831
A Monsieur le Comte de Montalivet, Ministre et
Sécrétaire d'état au département de l'intérieur
Monsieur le Ministre
J'ai l'honneur de vous adresser ci-joint un exemplaire de mon traité des
fonctions elliptiques, en deux volumes in 4°, avec deux supplémens formant le
commencement du 3eme volume.
Cet ouvrage, le plus important de ceux que j'ai publiés, m'a coûté, à
diverses reprises, un grand nombre d'années de travail, c'est sur lui
principalement que je dois fonder l'espérance d'obtenir de la postérité une place
honorable parmi les géomètres de mon époque.
Je vous le présente, Monsieur le Ministre, comme le meilleur titre que je
puis avoir d'obtenir de vous les arrérages de la pension dont j'ai été privé, par
ordre de votre prédécesseur M. de Corbière, depuis le 1e r septembre 1824
jusqu'au 12 janvier 1828. -- En effet lorsque cette disgrace, tout à fait
imméritée est tombée sur moi, j'avais commencé de faire imprimer à mes frais
l'ouvrage dont il s'agit. L'impression a été continuée, malgré l'événement, et
elle a été poussée assez rapidement, car le 1e r volume a été présenté à
l'académie des sciences le 12 septembre 1825 et le second l'a été le 10 juillet
1826. Les deux volumes, joints aux deux supplémens, m'ont couté plus de
12000 fr. qu'on peut presque considérer comme une perte égale à celle de
10100 fr que m'a fait supporter M. de Corbiere. Car depuis le mois de janvier
1827 que l'ouvrage est en vente chez Mr s Creuttel et Wurtz, jusqu'à l'époque
actuelle, c'est-à-dire dans un espace de 4 ans,la vente m'a produit deux mille
francs, et la lenteur du débit de ces sortes d'ouvrages me ferait attendre bien
plus longtems pour en tirer deux autres mille francs.
Vous prendrez sans doute en consideration, Monsieur le Ministre, le
sacrifice qu'un vieillard peu fortuné a fait pour sa propre reputation et pour
l'intéret des sciences, dans le tems même où il était persécuté par un
gouvernement oppressif et ennemi des lumières.
De pareils sacrifices
supposent des sentimens peu communs que vous savez apprécier, et qui, je
l'espère, vous disposeront à accueillir favorablement la demande exprimée dans
ma dernière lettre.
Veuillez, Monsieur le Ministre, agréer l'hommage
de mon profond respect
Le Gendre
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[Montalivet à Legendre, 20 Janvier 1831] [Draft]
20 Jan
à Mr Legendre, membre de l'académie des sciences
et du Bureau des Longitudes,
Quai Voltaire No 9
Monsieur,
Je n'ignorais pas les circonstances que vous m'avez rapellées dans la lettre
que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire et par laquelle vous réclamez les
arrérages de la pension de 3000 francs dont vous jouissez sur les fonds du
Ministre de l'Intérieur. Je savais que cette pension vous avait été d'abord
enlevée, puis rendue avec réduction et enfin d'une manière intégrale; et je m'en
suis félicité, Monsieur, avec tous les amis de la science. Malheureusement il ne
m'est pas possible aujourd'hui de vous faire rembourser les arrérages, non
soldés, depuis 1824 jusqu'à 1830 de la pension dans laquelle vous avez été
réintégré le 1e r septembre dernier. -- Les comptes de chaque exercice écoulé
depuis la suppression de votre pension ont été rendus; il me serait donc tout à
fait impossible de revenir sur une comptabilité depuis longtemps assurée; un
pareil mode serait irrégulier, contraire aux règles de finance; il ne me reste
donc, Monsieur, qu'à vous exprimer le regret bien sincère que j'éprouve de ne
pouvoir acceuillir votre demande ainsi que je l'aurais désiré.
[On 23 Novembre 1830, Président Girard of the Académie des Sciences had
written to Montalivet in support of the award to Legendre of la Croix d'Officier
de la Légion d'Honneur. As precedents, Girard had listed the awards given to
Académiciens Delabillardière (26 Nov. 1800, Botony), Lalande (26 Dec. 1801,
Astronomie), Navier (26 July 1824, Mécanique), Savart (5 Nov. 1827,
Physique), and Flourens (1 Nov. 1828, Agriculture). Montalivet received official
word of the award from the Grand Chancelier of the Légion on 20 Janvier 1831,
the same day Montalivet wrote the previous letter.
Presumably Legendre
learned of the award at about the same time he learned of the impossibility of
being granted the arrears he sought.]
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[Legendre à Montalivet, 26 Janvier 1831]
A Monsieur Le Comte de Montalivet, Pair de France,
Ministre et Sécrètaire d'état au département de l'intérieur
Monsieur le Ministre,
Je suis trés flatté d'avoir obtenu de Sa Majesté le titre d'officier d'officier [sic]
de la legion d'honneur, ce qui prouve que le Roi Citoyen qui préside au destinées
de la France, prend en considération tous les genres de travaux et les regarde
comme concourant également à former le faisceau des gloires nationales.
Veuillez, Monsieur le Ministre, recevoir l'hommage de mes remerciemens pour
l'appui généreux que vous avez bien voulu me prêter dans cette circonstance.
Cependant, je ne puis pas vous laisser ignorer qu'il y a quelqu'irrégularité
dans la démarche que M. L'ex-président de l'académie a faite près de vous pour
me procurer cette distinction.
L'académie n'a rien demandé pour moi, elle ne devait rien demander; M.
Girard a agi par la seule impulsion de son zèle, et dans l'intention sans doute de
m'obliger, il a agi à mon insçu; car s'il m'avait fait part de son projet je l'en
aurais dissuadé.
En effet il ne me convenait pas de fatiguer le gouvernement par des
demandes multipliées et intempestives. En partant du principe qu'une pension
accordée à un savant, comme récompense de ses travaux, est une veritable
propriété dont il ne peut être dépouillé arbitrairement sans injustice, j'avais
sollicité d'abord de M. de Martignac et ensuite de M. Guizot, la restitution des
arrérages montant à 10100 fr de la pension dont j'avais été privé sous le
ministère de M. de Corbière. Vos deux honorables prédécesseurs, Monsieur le
Ministre, n'ont pas contesté la légitimité de ma demande, mais n'ayant pas de
fonds spéciaux pour y faire droit, ils m'avaient fait espèrer que ma demande
pourrait être accueillie lorsque les circonstances seraient devenues plus
favorables. A votre avenement au Ministere j'ai eu l'honneur de vous reproduire
la même demande, mais j'ai vu avec chagrin que vous ne l'avez pas accueillie et
que même vous ne m'avez donné aucune espérance de l'accueillir dans un autre
tems. Je puis donc croire que la demande formée à mon insçu par le président
de l'académie, demande que vous vous êtes empressé d'accorder, a pu influer
sur la réponse négative, que ma propre demande, bien plus importante pour
moi, a essuyée. Et cependant en vous envoyant un exemplaire de mon grand
ouvrage, je pensais vous avoir présenté à l'appui de ma demande, une nouvelle
considération qui était de quelque valeur. En effet un savant peu fortuné qui
après avoir été privé pendant plusieurs années d'une pension de 3000 fr dont il
jouissait, n'en continue pas moins de faire imprimer à ses frais un ouvrage
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considérable dont la dépense monte à 12000 fr et ne pourrait été recouvrée
qu'après un grand nombre d'années, ce savant assurément ne trouverait pas
beaucoup d'imitateurs dans le tems présent, et le pur amour de la science dont
il donne l'exemple dans cette entreprise,
méritait d'être accueilli par un
Ministre ami des lettres et des sciences.
Je demanderais donc, Monsieur le Ministre, que sans m'être plus favorable
que Mr s de Martignac et Guizot, puisque les circonstances semblent ne pas le
permettre, vous ne fussiez pas plus rigoureux et que vous me laissiez
l'espérance de voir un jour ma demande accueillie, si le Ciel accorde encor
quelques années d'existence à un vieillard de 79 ans qui voudrait avant de
mourir, pourvoir au sort de sa femme et la mettre dans le cas de me solliciter
aucun secours du gouvernement.
Veuillez, Monsieur le Ministre, agréer
l'hommage de mon profond respect
Le Gendre
Paris le 26 janvier 1831
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[Legendre à Royer-Collard, 7 Février 1831]
A Monsieur Royer Collard directeur des sciences,
lettres et arts, au Ministère de l'intérieur
Monsieur,
Je n'ai point encore reçu de réponse aux deux lettres que j'ai eu l'honneur
d'addresser à Monsieur le Ministre, les 15 et 26 Jan dernier.
Ma lettre du 15 à laquelle était joint un exemplaire de mon ouvrage en trois
volumes in 4° dont je faisais hommage à Monsieur le Ministre, avait pour objet
de présenter un argument en faveur de la demande que j'avais faite des
arrérages dont j'avais été privé injustement par M. de Corbière. En effet il est
assez remarquable et d'un exemple peu commun, qu'au moment où le Ministre
me faisait éprouver une perte notable et imméritée, j'aie fait imprimer à mes
frais et par amour pour la science, un ouvrage qui m'a couté 12000 fr et dont
je savais bien que je ne serais guère dédommagé par la vente, puisque sept ans
après le commencement de l'entreprise, et quatre ans aprés que l'ouvrage eût
vu le jour, j'en ai retiré à peine 2000 fr par les soins de la Maison Creuttel et
Wurtz à qui la vente est confiée.
L'autre lettre datée du 26 avait pour but de remercier Monsieur le Ministre
de la faveur qu'il m'avait procurée d'être nommé par Sa Majesté officier de la
légion d'honneur, faveur que je n'avais nullement sollicitée. Je temoignais en
meme tems à Monsieur le Ministre, qu'il était affligeant pour moi d'avoir reçu de
lui une réponse absolument négative sur la demande que j'avais formée de la
restitution des mes arrérages. Ses prédécesseurs Mr s de Martignac et Guizot,
à qui j'avais adressé la meme demande, n'ayant pas pu y faire droit, m'avaient
au moins laissé l'espoir que ma demande pourrait être accueillie dans un tems
plus favorable.
Je m'adresse donc à vous, Monsieur, pour que Vous veuillez bien mettre de
nouveau, s'il y a lieu, mes deux lettres sous les yeux de M. Le Ministre et
m'obtenir une réponse moins décourageante que celle qui est contenue dans la
lettre du 20 janvier antérieure à ma lettre du 26.
Agréez, Monsieur, l'assurance de mon
considération la plus distinguée
Le Gendre
Paris le 7 février 1831
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